Ces dernières années, la question des circulations artistiques s’est invitée à l’agenda des grandes institutions culturelles en Europe. Plusieurs expositions majeures en témoignent, à commencer par la très attendue, Paris Noir : circulations artistiques, luttes anticoloniales (1950 – 2000), qui vient de s’achever au Centre Pompidou. En 2024, son pendant arabe se tenait au musée d’Art moderne de Paris, sous le titre Présences arabes – Art moderne et décolonisation – Paris 1908-1988. Toutes deux mettaient en lumière l’importance des circulations et le rôle des artistes africains, afro-descendants ou arabes sur la scène parisienne au cours du 20e siècle. Avant elles, d’autres événements avaient déjà ouvert une brèche, dévoilant l’apport des échanges – esthétiques, théoriques, politiques – à l’histoire de l’art mondiale. Ainsi en 2020, le Centre Pompidou présentait Global(e) Resistance, comme une tentative de dresser le panorama d’un art contemporain en résistance dans les pays dits du « Sud Global ». Dans cette même lignée, Adriano Pedrosa imaginait pour la 60e Biennale de Venise une immense exposition placée sous le thème des Étrangers Partout.
Si le sujet des circulations contemporaines semble peu à peu gagner les rangs des grandes institutions occidentales, il est depuis longtemps au cœur des réflexions des historiens de l’art. Depuis les premiers écrits sur le Grand Tour – ce voyage initiatique mené par les élites européennes pour parfaire leur éducation – jusqu’aux ouvrages les plus récents sur le phénomène de la globalisation de l’art, en passant par ceux consacrés au décentrement des modernités au 20e siècle ; l’historiographie sur le sujet est pour le moins riche.
Depuis les années 1990, ces circulations se sont largement intensifiées, marquant ce que beaucoup d’historiens qualifient de « tournant global » – on pourrait questionner ce paradigme. Avec la fin de la Guerre froide, l’avènement d’Internet et du capitalisme mondialisé, des réseaux artistiques se sont constitués en dehors de l’axe euro-américain. Renversant de vieilles dichotomies opposant le centre (Paris, Londres et New-York) à la périphérie (le reste du monde), cette période a favorisé l’éclatement des scènes artistiques à l’échelle planétaire, générant de nouveaux circuits Nord-Sud et Sud-Sud. Dans ce paysage de l’art renouvelé – où demeurent toutefois certaines formes de domination – le rôle joué par les biennales est central. Ces rendez-vous internationaux – recensés aujourd’hui à plus de 300 – sont devenus de véritables laboratoires de la création contemporaine, et sont perçus comme des lieux catalysant les questionnements de nos sociétés.
Comment définir aujourd’hui le paysage mondial de l’art contemporain à l’aune de ses circulations ? En quoi celles-ci ont-elles évolué depuis les années 1990 ? Comment participent-elles à redéfinir les lieux de l’art aujourd’hui ? Et que produisent ces échanges sur le plan artistique ? Pour son prochain numéro, Le Grand Tour souhaite inviter un·e auteur·ice à questionner ces nouvelles formes de circulations à travers un article de 10 000 signes, à paraître en avril 2026.
Historiens de l’art, critiques, artistes, curateurs, chercheurs ou auteurs passionnés… Nous vous invitons à proposer vos regards, vos récits, vos analyses ou même vos expériences personnelles. Envoyez-nous une proposition d’environ 500 mots, accompagnée d’une courte biographie, avant le 30 septembre 2025 sur l’adresse suivante : jhancart@technikart.com.
Les propositions ancrées dans des exemples concrets, adoptant un angle original ou un format créatif seront particulièrement appréciées. Le Grand Tour n’est pas une revue scientifique : nous aimons les approches inattendues, les écritures sensibles, narratives ou expérimentales.